Le Morne, jusqu’où aller ensemble
Le Morne, jusqu’où aller ensemble
Le Morne par Jean-Luc, Steve, Megan et Dorian dit “Dodo”
Ce matin-là, le Morne nous attendait, immense et immobile, comme s’il savait déjà jusqu’où il nous laisserait aller.
Avant même de commencer la montée, nous avons fait un choix de famille : Papou et Nona resteraient à la plage du Morne, à l’ombre, face au lagon. La montagne, elle, serait pour nous quatre.

À 55 ans, je le savais : cette montée ne serait pas anodine. Dès les premiers mètres, le souffle s’est fait plus court. Rien d’inquiétant, mais une présence. Celle de l’effort. Celle du corps qui rappelle qu’il faut écouter, respecter le rythme.
Steve, lui, à 40 ans, semblait presque flotter. Moins essoufflé, plus aérien. Il alternait entre photos, sourires et ce moment presque magique où son drone s’est mis à danser au-dessus du Morne, comme un oiseau curieux, capturant ce que nous vivions d’en bas.
Dorian, dit “Dodo”, du haut de ses deux mètres, montait avec une facilité déconcertante. De grandes enjambées, un regard calme, presque joueur. La montagne semblait à sa taille.
Megan, elle, avançait avec plus de difficulté, mais avec une détermination silencieuse. Ce qu’on oublie parfois, c’est qu’elle avait laissé le petit Jules, 11 mois, qu’elle allaite encore, confié avec beaucoup de soin avant de partir. Chaque pas était aussi chargé de cette absence temporaire, de cet instinct maternel qui ne la quittait pas.
Le sentier devenait de plus en plus exigeant. Les racines obligeaient à regarder où l’on posait le pied. Les pierres rendaient certains passages instables. On s’entraidait sans même y penser. Un mot. Une main. Un regard.
On s’arrêtait souvent. Pour respirer, oui. Mais surtout pour regarder derrière nous. Le lagon s’éloignait, le bleu prenait toute la place, et le silence devenait presque respectueux.
Arrivés au plateau juste avant la barrière qui mène au sommet, nous avons compris.
La dernière partie était là, devant nous. Plus abrupte. Plus technique. Plus engagée.
Et nous avons décidé de nous arrêter.
Pas par peur.
Par sagesse.
Le Morne ne se conquiert pas, il se vit. Et ce plateau était déjà une victoire. Un point d’équilibre entre l’envie d’aller plus loin et le respect de nos limites. Nous nous sommes assis. Nous avons bu de l’eau. Nous avons regardé. Longtemps.
En redescendant, les jambes tremblaient un peu, mais l’essentiel était là. Nous avions partagé l’effort, la montée, les respirations, les silences. Nous avions fait corps, chacun avec son âge, son énergie, son histoire.
Le Morne nous avait accueillis… et retenus à temps.
Et c’est peut-être cela, le plus beau souvenir.
Jean-Luc Vasseur
Bonsplans.mu… les bons plans de l’île Maurice
